jeudi 12 octobre 2000

Jagat Singh Palace, Pushkar

"Pour moi, l'Inde est le pays étranger par excellence. Il a l'attrait d'une chose qui vous est totalement opposée"
Michel Tournier

Petit déjeuner à 8h30. Une nuée de serveurs s’empressent autour de nous. Avant de partir, nous visitons brièvement l’atelier d’un peintre en miniatures, puis nous prenons la route, direction Pushkar, à 130 km de Devgarh. Pushkar est l’un des lieux les plus sacrés de l’hindouisme. En effet, on dit que Brahma, le dieu créateur, laissa échapper de ses mains une fleur de lotus, qui, lorsqu’elle toucha le sol, se transforma en lac pour donner le site de Pushkar. Mais, avant d’y parvenir, nous devons traverser la très animée ville d’Ajmer, important centre de pèlerinage musulman, où est enterré un saint souffi. Nous aurons pas mal de difficultés à nous en dépêtrer. Nous fûmes tout particulièrement confrontés à un Rickshaw récalcitrant, qui ne daigna s’écarter de notre trajectoire qu’au 38ème coups de Klaxon. Ce matin, Laure a des maux de tête et des contractions dans le ventre, je commence un peu à m’inquiéter. Sur l’autoroute NH8, que nous empruntons depuis Udaïpur, on ne compte plus les bahuts renversés sur le bas côté ou les cadavres d’animaux en putréfaction dont l’odeur nous prend à la gorge.


Il est 13h, nous atteignons enfin Pushkar, où nous nous installons, un petit peu à l’extérieur des murs, dans le flambant neuf hôtel Jagat Singh Palace. Construit dans le plus pur style d’un fort Rajpute, il possède d’imposantes murailles et un agréable jardin. Alors que Laure fait une petite sieste réparatrice, je regarde la présentation télévisée de la coupe d’Asie de football Liban 2000 ! Nous nous dirigeons ensuite vers la ville à proprement parlée, qui s’articule autour du lac sacré. Il y règne une atmosphère assez étrange entre les sadhus, hommes saints aux cheveux hirsutes, vêtus d’un unique pagne safran, et les occidentaux au style hippie, qui hantent les rues du bazar. Pour dire vrai, j’ai une première impression assez mitigée. Il est 15h, il fait plus de 37°C, et nous décidons de partir en excursion pour rejoindre le temple de Savitri, au sommet de la colline qui domine Pushkar. On peut dire que l’ascension fut plus que pénible. Ayant légèrement présumé de mes forces, je suis parti comme une bombe en laissant sur place Laure. Malheureusement, j’ai été victime d’un coup de barre dans les derniers lacets, et Laure m’a rejoint et presque aidé à atteindre le sommet ! Mais, le spectacle offert en valait la chandelle. Le panorama sur la ville, le lac et les collines environnantes est bluffant ! La descente s’avérera moins exigeante, et nous voici dans les rues du bazar, où échoppes pour touristes et restaurants pure veg se succèdent. Mais il est bien plus intéressant de s’attarder sur les ghats, ou une fois déchaussés, on est témoin de spectacles saisissants. Il faut néanmoins éviter les roublardises de certains prêtres, qui nous proposent de faire des pujas (rites sacrés) en notre honneur, pour les facturer ensuite au prix fort. De même, il ne faut pas accepter les fleurs qu’ils nous tendent, afin que nous les jetions dans le lac sacré, car il nous sera demandé quelques roupies en échange. Mais, conscients de ces pièges, nous ne nous laissons pas abuser.

Nous visitons le temple le plus sacré de Pushkar : celui dédié à Brahma. C’est le seul temple en Inde qui soit dédié au dieu créateur. Il n’est pas particulièrement spectaculaire car construit au 18ème siècle, suite à sa destruction par les Moghols. On observe néanmoins dans le sanctuaire, une statue de Brahma, dieu barbu à trois têtes. Il est 17h30, nous sirotons un Pepsi à la terrasse d’un café à l’hygiène douteuse, exclusivement fréquenté par des occidentaux baba cool, que le mélange Inde/Pétard n’a pas vraiment arrangé ! Le soleil commence à tomber sur la ville, nous décidons de finir la visite par un tour des berges du lac au couchant. Nous croisons un flot de fidèles sur le chemin du bain, traversons plusieurs temples, où d’impressionnants sadhus croisent nos regards. Certains ghats sont remplis de singent turbulents, qu’il faut surveiller du coin de l’œil. A travers cette promenade, nous nous imprégnons véritablement de la dimension sacrée du site. Comme convenu, nous retrouvons notre chauffeur au point de rendez-vous à 18h. Il nous avouera avoir profité de l’après-midi pour se baigner pour la première fois dans le lac sacré ! De retour à l’hôtel, nous prenons le frais dans le jardin, baignés par les rayons de lune. Encore une fois, nous sommes les seuls clients de l’hôtel. Le dîner dans la salle à manger, magnifiquement peinte, sera des plus goûteux. Je déguste un Paneer butter massala accompagné de riz et d’un excellent Lassi (sorte de yaourt à boire). Je finis par un thé aux épices, rassasié et impatient de découvrir demain Jaïpur, la ville rose.

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